Discours de Monsieur BENOIT Thierry, chargé de programme madagascar au FIDA
LORS DE L’OUVERTURE OFFICIELLE
DE L’ATELIER PREPARATION DU COSOP FIDA
(COSOP = exposé des options et stratégies d’intervention)
Antananarivo - Madagascar – 03 Mai 2006
Excellence, Monsieur le Ministre de l’Agriculture, de l’Elevage et des Pêches ,
Mesdames et Messieurs les chefs de régions,
Mesdames et Messieurs les Représentants des bailleurs de fonds, des organisations de la société civiles,
Mesdames et Messieurs les membres du groupe de préparation du COSOP FIDA,
Bonjour,
C’est un grand plaisir de vous souhaiter la bienvenue à cet atelier préparatoire du COSOP FIDA et seconde réunion du groupe de travail COSOP. Je vous remercie d’avoir répondu à notre invitation en particulier ceux qui se déplacent de loin, depuis les régions reculées de Madagascar.
Nous sommes en effet ici pour développer la stratégie du FIDA pour les 6 prochaines années. Un certain nombre de travaux préparatoires ont déjà été effectué, et nous comptons aujourd’hui sur vos contribution en tant que praticiens et donc experts du développement pour effectuer les analyses et propositions qui permettront d’établir une stratégique pragmatique et efficace.
Présentation FIDA :
Pour rappel, le Fonds International pour le Développement Agricole que je représente est une institution technique des Nations Unies, spécialisée dans l’Agriculture comme son nom l’indique. Et la question de l’agriculture, comme moteur du développement, spécialement à Madagascar est très importante.
Le FIDA a été crée suite à la conférence mondiale sur la faim en 1974 et a débuté ses opérations en 1978. Aujourd’hui le FIDA compte 163 états membres et a soutenu au cours de ses 30 ans d’existence plus de 650 projets dans 113 pays en appui à plus de 250 millions de ruraux pauvres. Le FIDA intervient principalement sous forme de prêts hautement concessionnels à des projets et programmes gouvernementaux. Environ 500 millions de dollars sont attribués chaque année a une trentaine de nouveaux projets. Actuellement, plus de 200 projets sont en cours dans le monde.
Le FIDA à Madagascar
L’histoire du FIDA avec Madagascar date maintenant de plus de 25 ans. Depuis 1979, le FIDA a financé 10 projets de développement rural à Madagascar, pour un montant total de 106 millions de dollars. Trois d’entre eux sont en cours, l’un va clôturer et un nouveau commencera avec la fin de l’année 2006.
Dans la décennie ‘80, les projets du FIDA se concentraient surtout dans les Hautes Terres, et avaient pour objectif principal d’augmenter la riziculture irriguée, et d’assurer l’autosuffisance alimentaire des populations rurales. L’approche consistait à remettre en état l’infrastructure rurale (routes et systèmes d’irrigation).
Puis dans les années 90, les projets se sont déplacés dans des régions moins peuplées comme le Moyen-Ouest puis le Mandrare avec pour but d’aménager de nouvelles zones pour réduire la pression démographique sur le plateau central, de diversifier la production agricole, souvent sous la forme de projet de développmenent intégrés centrés sur des zones précises.
Enfin, aujourd’hui le FIDA est surtout présent sur les zones côtières. Les projets actuels sont plutôt d’ordre thématique, axés sur l’appui aux communes, le renforcement de l’accès au marché ou prochainement l’appui à la réforme foncière.
Le programme en cours d'exécution représente un montant total de 42 millions de USD et compte trois projets :
- Le Projet d’Appui au Développement Agricole dans le Nord Est (PADANE) qui se cloture en Juin de cette année et assuré la promotion des producteurs - préparateurs de vanille associés à la mise en place d’un réseau d’épargne crédit OTIV et la réhabilitation de la culture du riz dans la SAVA.
- Le Projet de mise en valeur du haut bassin du Mandraré – Phase II (PHBM), dans le Sud aride est un projet de développement rural intégré mettant fortement l'accent sur la promotion des organisations d'agriculteurs et le développement des liens avec le marché.
- Le Programme de promotion des revenus ruraux (PPRR) dans les zones côtières orientales soutient l'accès au marché.
- Le Projet d'appui à la sécurisation foncière et au développement rural durable (AD2M), dans l'ouest du pays, promeut l'accès à la terre et la gestion foncière et comprend un appui à l'élaboration des politiques en la matière.
La stratégie du FIDA à Madagascar :
Le précédent COSOP date de l’année 2000. Il est nécessaire de le refondre entièrement vu l’évolution du pays au cours de ces dernières années. La stratégie du FIDA à Madagascar doit compléter les efforts du gouvernement dans la poursuite de l’Objectif 1 de la déclaration du millénaire (réduire de moitié la proportion de la population dont le revenu est inférieur à un dollar par jour).
Son fondement est le cadre stratégique du FIDA pour la réduction de la pauvreté rurale et la stratégie du FIDA pour la réduction de la pauvreté en Afrique orientale et australe. Cette dernière vise essentiellement à renforcer les liens aux marché des ruraux, afin de sortir les ruraux pauvres de l’économie de subsistance et améliorer leur niveau de vie.
Méthode d’élaboration du COSOP :
L’objectif du COSOP est de mettre en œuvre un programme FIDA dans le pays, qui donnera une cohérence à l’ensemble de nos actions et réunira les projets sur prêts, les dons, l’appui aux organisations de la société civile, la gestion des savoirs, le dialogue sur les politiques de développement, etc… Le COSOP sera constitué pour partie des projets en cours et des futurs projets à développer.
Pour ce faire le gouvernement et le FIDA se sont entendus sur un processus participatif qui s’étend sur une durée de 6 à 9 mois et dont les étapes sont les suivantes.
Pour bâtir cette stratégie nous avons prévu
i) évaluer l’état du secteur rural et sa place dans la politique du Gouvernement (c’est la revue documentaire et les rencontres de partenaires qui ont eu lieu en février)
ii) connaître le pays et des régions ou le FIDA n’intervient pas, c’est l’objet des études régionales
iii) allez écouter les principaux acteurs/ beneficiaires, donner une voix aux plus pauvres : c’est l’objet des enquetes pauvreté dans les communautés…
iv) tirer les leçons de l’expérience, c’est l’objet de la revue de portefeuille,
Tous ces résultats vous seront présentés ce matin, pour nourrir la discussion, d’abord par un exercice de questions réponses et cette après midi des travaux de groupe qui seront restitués en fin de journée.
La participation est un élément clé de cette stratégie. C’est pourquoi nous avons procédé à la constitution d’un groupe de travail constitué de partenaires du développement provenant du Gouvernement, de la Société Civile, des Organisations professionnelles, et des autres bailleurs de fonds. Ce groupe d’appui au COSOP suit le processus du début à la fin.
Ou allons nous ? Objectif stratégique. L’important pour les FIDA est de mettre les agriculteurs (en tant qu’acteurs d’une activité économique de base) et leurs organisations professionnelles, les producteurs agricoles pauvres au coeur de la stratégie et améliorer leurs conditions de vie.
Il existe plusieurs éléments de convergence entre les thématiques nationales et le mandat du FIDA
- La Vision Madagascar naturellement et le MAP fondent le développement économique sur des pôles de croissance. Le FIDA peut apporter son expérience des zones rurales pauvres à cette nouvelle approche, en recherchant comment développer les effets d’entraînement au bénéfice des zones rurales où vit la majorité de la population et faciliter l’intégration des zones pauvres dans les dynamiques de croissance. Voir expérience PHBM et PPRR.
- Le rôle des régions est déterminant, les pôles de croissance sont identifiés dans les PDR –. Les projets FIDA sont ancrés au niveau régional. Le FIDA peut appuyer les régions en vue de développer des politiques de croissance pro-pauvre. Développer les articulations entre le local, le communal, le régional.
- le PNDR met l’accent sur le développement des filières. Ceci suppose le développement des activités amont et aval d’appui à l’agriculture. Le FIDA a une forte expérience dans le domaine de l’appui aux micro et petites entreprises rurales. Rôle crucial du développement de ce secteur en milieu rural pour la diversification des revenus, non seulement pour appuyer production, commercialisation et transformation des produits agricoles mais aussi comme nouvelle source de création d’emploi pour une population rurale en croissance et des terres de plus en plus saturées. Le fait d’amener le secteur primaire (la production) à se combiner, à se relier avec le secteur secondaire (transformation) et tertiaire (services) sont des éléments clefs du développement rural.
- l’accès des pauvres aux facteurs de production et aux services en milieu rural est soumis à de fortes inégalités (voir présentation AMED qui les mettra en lumière). Eviter que les nouvelles dynamiques de croissance les creusent, éviter le développement à 2 vitesses. Compléter la lutte contre la pauvreté par la réduction des inégalités et une meilleure inclusion des groupes les plus pauvres dans l’effort de développement. Les voies de cette inclusion constitueront un important sujet de débat cet après-midi.
En résumé l’objectif stratégique du FIDA sera : d’appuyer les efforts déployés par le gouvernement pour réduire la pauvreté rurale, stimuler le développement régional, en vue de faciliter la transformation du secteur rural traditionnel isolé en un secteur productif professionnel, compétitif et intégré dans le marché et dans la perspective d’un développement inclusif et équitable. Ceci se traduit par 3 objectifs spécifiques.
Objectif 1: Réduire la vulnérabilité des ruraux pauvres en promouvant les mécanismes collectifs de gestion des risques.
Objectif 2: Améliorer les revenus des ruraux pauvres en promouvant les entreprises rurales et la diversification des activités en milieu rural.
Objectif 3: Professionnaliser les petits producteurs en appuyant les organisations profesisonnelles et faciliter la fourniture de services d’intérêt commun (CSA) et la défense de préoccupations communes.
Par ailleurs, le FIDA participe à l’effort d’harmonisation de l’aide international et adhère à la déclaration de Paris. En plus de sa participation aux travaux du SMB à Madagascar, le FIDA souhaite nouer des partenariats ou son expérience développement local pourrait compléter celles de bailleurs intervenant plutôt sur les réformes de niveau macro.
Brièvement, laissez moi vous expliquer le fonctionnement des allocations de ressources par pays au FIDA :
L'allocation financière du FIDA en faveur de Madagascar est calculée au moyen du système d'allocation des ressources fondé sur la performance (SAFP), qui repose sur une évaluation de la performance macro-économique, des politiques et institutions rurales, et de la performance des projets. L'évaluation conduite en 2005 au titre du SAFP a fourni une note globale de 4,6 (sur un maximum de 5) et un engagement indicatif d'un montant approximatif de 6,2 millions de USD par an, soit 37,4 millions de USD pour la période couverte par le COSOP (2007-2012).
Enfin, les ambitions du COSOP : le FIDA et le Gouvernement souhaiterait au travers du COSOP arriver à une vision innovante mettant en oeuvre des projets efficaces ayant un impact démontré.
L’idéal serait un portefeuille de 4 projets actifs simultanément, par rapport aux 2 projets généralement en cours.
Des questions en suspens : pour ma part, avec ma connaissance partielle de Madagascar, je me pose une série de questions auxquelles j’aimerai trouver des réponses aujourd’hui avec votre aide.
- Pourquoi la théorie de la dissémination des innovations, de la tache d’huile, de la réplication des actions de développement ne fonctionne pas ou peu ? Pourquoi les réussites de projet sont elles peu diffusées au niveau national ? quelles leçons pouvons nous tirer des expériences de développement d’autres pays et comment les mettre en œuvre ?
- Comment le FIDA peut il tout en gardant sa spécificité et sa proximité des ruraux pauvres, parvenir à intégrer davantage les structures institutionnelles et les collectivités territoriales pour davantage pérenniser ses actions ? Comment aider les régions, les communes à devenir des facilitateurs efficaces du développement à l’écoute des dynamiques locales…
- Comment aider les pauvres ruraux à diversifier leurs activités pour un meilleur revenu, comme parade à la pauvreté et comme catalyseur de richesse ? Comment renverser ce cercle vicieux qui a fait que pour gérer les crises, le paysan se referme sur l’agriculture de subsistance ?
- Comment dynamiser le potentiel d’innovation, l’envie d’entreprendre qui repose en chaque homme et femme de ce pays ? Comment donner confiance aux entrepreneurs et investisseurs : du niveau familial au niveau international, pour relancer l’économie rurale et savoir nouer des unions/ des alliances avec les ruraux pauvres ?
En conclusion,
Je voudrais rappeler que pour le FIDA, ce ne sont pas les projets qui font le développement d’un pays. Ils sont seulement un moyen d’accompagnement à des politiques nationales claires, des stratégies et des plans d’actions définis, et surtout ils doivent appuyer des initiatives locales, identifier les dynamismes existants pour les accompagner.
Je pense que ce séminaire doit être vu comme un lieu de dialogue pour tous : une occasion de présenter les enquêtes pauvreté qui viennent d’être réalisées, la revue de portefeuille des projets du FIDA mais surtout l’occasion d’échanger entre acteurs de différents horizons et l’occasion d’affiner des points de manière concrète au niveau des groupes de travail qui auront lieu cette après midi.
Pour terminer, je voudrais remercier les hautes autorités de Madagascar qui permettent la tenue de cet atelier et je souhaite plein succès à la politique de développement du pays.
Excellence, Mesdames et Messieurs, je vous remercie.
Au titre de son programme, le FIDA promouvra des stratégies inclusives et de nouveaux mécanismes visant à favoriser une distribution plus équitable des bénéfices de la croissance et une meilleure intégration des zones les plus pauvres et des groupes les plus vulnérables dans le processus de développement.